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Ergonomie ou pédagogie ?

( 6 octobre 2008)

Percevoir et penser en hyperpaysage, c’est se laisser désorienter tout en gardant les moyens de pouvoir s’y retrouver quand on le désire.

Pour J. Rhéaume, lors de la conception d’un document hypermédia, il importe de tenir compte de trois difficultés :

• la surcharge cognitive qui provient d’une part de la mémoire à court terme qui a tendance à tout oublier en passant d’un écran à l’autre, et d’autre part du manque d’acculturation de l’usager-lecteur qui n’a jamais développé cette habitude de lecture ;

• la désorientation du visiteur qui perd la liaison entre son projet de navigation et les informations qu’il est en train de lire (à un moment donné, il se demande d’où il vient, où il est, et ne sait plus très bien vers où aller et pourquoi y aller) ;

• la décontextualisation qui ne facilite pas l’attribution des informations à un tout reconnaissable.

D’où l’importance des traces qui permettent de rebrousser chemin et des cartes explicitant les réseaux de liens :

"Pour que l’hypermédia favorise l’acquisition d’une pensée complexe, il faut s’assurer de la saisie de l’image d’ensemble, qui ferait ressortir la complexité des relations relevées", par toutes les techniques de présentation textuelles et graphiques (Rhéaume, 1995).

Ces problèmes deviennent des qualités si la flexibilité entre les noeuds facilite la génération et l’organisation des idées.

Quatre principes devraient caractériser les noeuds :

1. L’information doit être partagée en petites unités, correspondant à un noeud, dont la grosseur devrait correspondre à l’espace de la mémoire à court terme.

2. Un noeud ne doit contenir que l’information relative à un aspect de la question et être bien identifiée par un titre.

3. Dans un sujet donné, les blocs d’information doivent présenter une certaine similitude quant aux mots, aux titres, aux formats et aux séquences.

4. Chaque noeud doit être étiqueté selon des critères spécifiques.

Les liens doivent établir des relations pertinentes entre les noeuds (unité de classe et de genre). Jamais les relations ne doivent être gratuites ; les apprenants doivent donc établir le réseau ou tableau d’ensemble qui montre le contour d’une question.

L’utilisation d’escamots ( ou pop-up windows - éléments escamotables dans une page web lorsque la souris quitte la zone sensible) est apparemment efficace pour plusieurs usages (Betrancourt et Caro, 1998) : pour mémoriser l’information, rechercher une information dans du texte, pour hiérarchiser et pour intégrer différentes informations en coréférence (facilite l’intégration cognitive). Ils permettent de gérer efficacement les différents niveaux d’information.

À propos de la conception d’hypermédias éducatifs, Choplin et alii (1998) estiment également que la question de l’ergonomie (la facilité avec laquelle on va naviguer dans l’hyperdocument) mérite débat et choix conscients. Dans une perspective constructiviste en effet, la création d’obstacles et de ruptures, la déconstruction, les dissonances, la désorientation, sont autant de tremplins pour apprendre (des panneaux indicateurs ne sont d’aucune aide pour développer le sens de l’orientation).

Il convient donc de trouver la juste place entre ergonomie et didactique constructiviste. Ainsi, ils proposent de réfléchir à la manière dont on peut instaurer une exploitation constructiviste de l’image. Ils suggèrent de partir de questions centrées sur l’apprenant et d’arriver à analyser les activités qu’il aura devant l’outil : quelles sont les questions qui se poseront à lui ? quels efforts aura-t-il à fournir ? seront-ils superflus car relatifs simplement à l’utilisation de l’outil ou au contraire nécessaires car relatifs au savoir enseigné ou à l’objectif pédagogique de l’outil ? quelles images injecter pour susciter le questionnement ?

L’ergonomie rimerait par contre bien avec une pédagogie plus transmissive, car "les attentes sont souvent les mêmes (sûreté, rapidité, concision, clarté)" (Choplin et alii, 1998, p. 93).

Références

Bétrancourt M., Caro S., 1998. Intégrer des informations en escamots dans les textes techniques : quels effets sur les processus cognitifs ?, in A. Tricot et J.-F. Rouet (éds), Hypertextes et hypermédias, Concevoir et utiliser les hypermédias : approches cognitives et ergonomiques, Paris, INRP/EPI, Hermès, pp. 157-173.

Choplin H., Galisson A. Lemarchand S., 1998. Hypermédias et pédagogie : comment promouvoir l’activité de l’élève ?, dans Hypermédias et apprentissage 4, Actes du 4ème colloque Hypermédias et apprentissages, Poitiers, INRP/EPI, éds J.-F. Rouet et B. de La Passardière, pp. 65-70.

Rhéaume J., décembre 1995. Hypertextes et réseaux, Éducatechnologiques (revue électronique), vol. 2, n°1, Québec, Université Laval, Faculté des Sciences de l’Éducation, www.fse.ulaval.ca/fac/ten/re...