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Architecture moléculaire

( 22 août 2008)

Percevoir et penser en hyperpaysage, c’est activer un schéma de pensée de type systémique pour appréhender ce qui se passe autour de nous.

Une des manières d’apprécier dans quelle mesure les auteurs d’un hyperpaysage se sont inscrits dans une approche de la complexité du paysage, c’est d’examiner quelle est la structure globale de l’hyperdocument : correspond-elle à une architecture en arbre ou en flocon de neige (organisation linéaire des idées) ou à une architecture moléculaire (organisation systémique des idées) ?

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Architecture systémique

Une architecture moléculaire se caractérise par :

- l’abondance de liens réflexifs ;

- la présence de circuits de causalité circulaire lorsqu’une interprétation des est proposée ;

- la proposition de plusieurs circuits potentiels à partir de nombreux noeuds ;

- des carrefours pluridirectionnels (entrants ou sortants).

Lorsqu’un hyperpaysage est réalisé à plusieurs mains, la négociation de l’architecture d’ensemble représente un passage clé de l’apprentissage : il convient de se mettre d’accord sur l’articulation des idées entre elles.

Pour faciliter cette négociation cruciale, les nombreuses expérimentations réalisées, que ce soit en milieu scolaire ou avec des adultes, ont mis en évidence l’intérêt de disposer d’outils pour induire un mode de pensée qui favorise les liens entre les éléments de l’hyperpaysage dès le début de sa conception.

Les outils suivants ont été jugés pertinents :

- Le photolangage

C’est déjà lors du premier contact avec le paysage, tout comme avec une problématique quelconque, que l’on peut proposer une phase d’accrochage qui induise un regard et une relation plutôt de type systémique.

A titre d’exemple, nous avons choisi le photolangage comme outil d’entrée en matière.

Une panoplie large et diversifiée de photos en tous genre est proposée pour être associées au paysage (ou à la problématique traitée), constituant autant de fenêtres potentielles à ouvrir, de liens à établir.

C’est un outil qui ouvre les perspectives, qui stimule l’imagination.

- Les maquettes

Le principe est d’utiliser une photo du paysage panoramique que l’on se propose d’animer. Sur cette photo, sont circonscrites les zones sensibles. On y note aussi les mots clés des étiquettes qui leur seront associées.

Des liens matérialisés par des bouts de ficelle relient ces zones sensibles à des cartons sur lesquels est noté en substance le contenu du noeud ainsi visualisé.

Deux types de maquettes peuvent être envisagées :

La maquette-mobile : élaborée à partir d’une photographie imprimée de l’hyperpaysage ou d’un assemblage artisanal des photos assemblées, dont les extrémités sont jointes de manière à former un cylindre, c’est une sorte de carte de pensée en 3D, sous forme d’un mobile.

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Maquette d’un hyperpaysage
Expérimentation à l’Institut du Sacré-Coeur de Visé en 5e TQ.

C’est un outil qui semble particulièrement bien convenir à des élèves de l’enseignement primaire car le passage du paysage réel au paysage virtuel en 3D, quoique en cylindre inversé sur la photo ci-dessous, est plus facile pour eux.

Ici, ce sont des photos qui ont été associées aux zones sensibles, plutôt que des cartons avec de petits textes. Ce choix didactique privilégie l’intelligence visuo-spatiale plutôt que l’intelligence verbo-linguistique.

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La maquette-mobile

La maquette plane : ici, la bandelette de papier sur laquelle l’image panoramique est imprimée est longue d’un ou deux mètres et ses extrémités ne sont pas reliées.

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Maquette plane

C’est une formule plus pratique mais imposant très vite (peut-être trop vite), de choisir quelle sera la portion du paysage au "centre".

L’utilisation de ficelles de couleur permet de réaliser un travail nuancé, en codifiant directement la nature des liens entre les éléments.

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Des liens de différentes couleurs
Maquette produite par des étudiants en sciences humaines de la Haute Ecole ISELL Sainte-Croix de Liège

Par exemple, les couleurs peuvent exprimer un regard multi ou interdisciplinaire, en mettant en évidence la diversité des aspects considérés : historique, géographique, politique, économique, social, culturel... Elles peuvent aussi exprimer la diversité des points de vue (une couleur pour chaque type d’acteur, par exemple).

La suite du scénario se construit avec la contrainte de multiplier les liens pour que chaque carton-idée soit relié à au moins un élément visible du paysage ainsi qu’à au moins un autre carton.

Les maquettes présentent l’avantage d’être souples, les fiches et les ficelles pouvant facilement être déplacées. Les décisions peuvent être remises en question et les liens retissés jusqu’à ce que l’on soit satisfait. Nous avons constaté que cela stimule davantage l’imagination pour créer des liens et inviter aux associations libres d’idées.

C’est aussi un outil qui permet de répartir le pouvoir entre tous, chacun pouvant, sans passer par un intermédiaire, ajouter une fiche ou une ficelle, tandis qu’avec un outil plus traditionnel comme un panneau, une seule personne tient le marqueur pour transcrire les idées du groupe.

Ce sont les complexes jeux de pouvoir qui sont bousculés : la maquette introduit une référence à un autre mode de leadership et à une dynamique de groupe plus fluide. Elle permet que s’associent plus facilement les images-schémas des uns et des autres à propos de la structure d’ensemble, tandis qu’un panneau traditionnel va souvent révéler l’image-schéma de la personne qui tient le marqueur en main.

Si l’outil d’aide à la conception d’un hyperpaysage peut devenir une métaphore qui exprime la complexité, il est intéressant qu’il soit synonyme de fluidité et de dynamique.

Référence

Partoune C., 2004. Un modèle pédagogique global pour une approche du paysage fondée sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication, thèse de doctorat, Université de Liège.