Une trace de lithalse


A cet endroit, sur la plate-forme, on peut observer une cuvette remplie de tourbe entourée d'un rempart ± circulaire. D'avion, on s'aperçoit qu'il y en a d'autres aux alentours. Un petit tour en avion?
De nombreuses hypothèses ont été émises pour expliquer l'origine de ces formes très particulières : abreuvoirs pour les troupeaux qui pâturaient dans la fagne, viviers de pisciculture, canardières, cuves à lavage d'or, vestiges de carrières, phénomènes volcaniques, ...
Finalement, c'est le Professeur A. PISSART, de l'Université de Liège, qui découvrit l'origine naturelle de ces formes et qui expliqua les processus de leur formation grâce à des travaux menés à l'étranger.

A la fin du Pléistocène (vers ± 11.450 avant J.C.), le climat était froid et sec (température moyenne annuelle au sommet des Hautes Fagnes : -6°C, température moyenne de janvier : -22°C, température moyenne de juillet : +9°C).
Ces conditions climatiques étaient favorables à l'apparition d'un pergélisol discontinu (pergélisol = sol gelé en permanence toute l'année et plusieurs années de suite). En hiver, les sols dont la surface était irrégulière, étaient recouverts de neige, surtout à l'endroit des creux.

  Sous l'action du gel, l'eau contenue dans les limons et les argiles gelait en formant des lentilles de glace, lentilles d'autant plus abondantes que la couverture neigeuse était moins épaisse.
  Au fil des années, la croissance de ces lentilles donnait naissance à des buttes (palses minérales ou lithalses), sans manteau organique de couverture.
  Durant l'été, les sols restaient gelés. Seule la couche supérieure des buttes dégelait et formait une masse boueuse saturée d'eau. Cette boue s'écoulait très lentement sur les flancs des buttes et s'accumulait en périphérie. Ce phénomène d'écoulement boueux très lent (quelques centimètres par an) s'appelle la solifluxion.
  Vers ± 11450 avant J.C., au Préboréal, le réchauffement du climat faisait fondre la glace du sol laissant des cuvettes circulaires remplies d'eau, entourées chacune d'un rempart d'une hauteur variable (de 0,5 à 2 m). Les sédiments des remparts proviennent donc du sommet des buttes à la suite des phénomènes de solifluxion qui se sont déroulés durant moins de 1500 ans.
  Le comblement progressif des cuvettes par de la tourbe au cours de l'Holocène est à l'origine de tourbières que l'on peut observer actuellement en de nombreux endroits. Ces tourbières recèlent des groupements végétaux d'une richesse biologique remarquable.
  Situation actuelle.

Source : MARTINY P., 1999. Promenades pédestres en fagne de Malchamps-Bérinzenne, DGRNE, Jambes.



Rencontre avec Albert PISSART



Photo : C. Partoune

" Professeur, est-ce important pour vous de préserver ce paysage, et en particulier les traces de lithalses ? "

"Bien entendu, car sur le plan scientifique, il faut savoir que des traces de lithalses sont extrêmement rares. C'est donc une chance de pouvoir les étudier ici. De plus, même si l'on croit avoir trouvé une explication plausible à un phénomène, il vaut toujours mieux garder un " échantillon " intact, de manière à pouvoir encore l'étudier plus tard. De nouvelles techniques d'analyse peuvent nous apporter des informations qui nous amènent à réviser nos idées, ou de nouvelles hypothèses méritent d'être testées. Voyez comme les idées à propos de ces cuvettes remplies d'eau ont évolué depuis 50 ans ! "


Mais qu'est-ce qui peut menacer les lithalses de disparition ?

Revenons à la tour d'observation et réfléchissons à cette question


 

RETOUR PANORAMIQUE

 
     




Auteur : C Partoune -LMG-
Dernière mise à jour : 24 avril 2002