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Peur de l’inconnu, peur de se perdre

( 29 juillet 2008)

Percevoir et penser en hyperpaysage, c’est oser se perdre pour mieux se retrouver.

Désorienter ou guider ?

"Personne, sauf l’auteur d’un hypertexte, ne peut lire l’ensemble des textes compilés et codés selon une structure plus ou moins complexe qui interdit toute vision d’ensemble. Les réactions face à ce mode de lecture sont diverses : certains ont l’impression de passer à côté d’une partie du contenu sans le savoir alors que d’autres craignent de se perdre complètement dans la structure trop complexe du texte" (Bernier, 1998).

La désorientation est l’effet produit par le butinage ou la navigation trop rapide dans un hypermédia. Ce zapping tend à faire en sorte que l’apprenant ne sait plus d’où il vient ni où il va, ni comment revenir à un endroit précis.

Pour J. Clément (2000), cette "culture en miettes" reflète indéniablement une certaine perception du monde, et fait appel à d’autres formes de logiques que le cerveau humain est capable d’appréhender, mais nul ne peut prédire quel sera son avenir.

À propos de la conception d’hypermédias éducatifs, Choplin et alii (1998) estiment que la question de l’ergonomie (la facilité avec laquelle on va naviguer dans l’hyperdocument) mérite débat et choix conscients. L’ergonomie rimerait bien avec une pédagogie transmissive, car "les attentes sont souvent les mêmes (sûreté, rapidité, concision, clarté)" (p. 93). Dans une perspective constructiviste, la création d’obstacles et de ruptures, la déconstruction, les dissonances, la désorientation, sont autant de tremplins pour apprendre (des panneaux indicateurs ne sont d’aucune aide pour développer le sens de l’orientation). Il convient donc de trouver la juste place entre ergonomie et didactique constructiviste.

Acquérir du pouvoir sur son environnement

Certains estiment que la construction d’hypermédias peut contribuer à démystifier le côté magique de l’ordinateur pour bon nombre d’enfants et d’adultes. En les confrontant au faire, à l’action, on place les élèves dans un processus d’appropriation, et donc de construction active. La machine, les hyperdocuments, perdent leur statut d’objets magiques, dotés de pouvoirs incompréhensibles. La relation à la machine, perçue mythiquement comme toute puissante, est alors transformée (Rinaudo, 1993).

Plus fondamentalement, c’est le rapport au monde qui est transformé : "Avec l’image interactive, le spectateur jadis passif devient capable d’agir sur la représentation du monde qui lui est proposée. La perception devient un acte, une action, une interaction sur le monde" (Donguy, s. d.).

La participation en tant qu’utilisateur et surtout en tant que producteur d’hypermédias sur Internet peut contribuer à construire de nouvelles identités communautaires, à atténuer la peur de l’inconnu, de l’autre, avec qui il est possible d’entrer en interaction de manière progressive.

Des astuces pour éviter de (trop) se perdre

Les multiples liens offerts au visiteur de pages web, s’ils présentent l’avantage de lui proposer une découverte selon un mode proche du fonctionnement associatif de son cerveau, ont cependant comme désavantage de rapidement lui donner la sensation d’être "perdu" (au bout de 3 "clics", il devient déjà difficile de se remémorer d’où l’on venait et sur quoi exactement on avait cliqué). Or, un de nos objectifs, en concevant cette visite virtuelle, c’est de faire prendre conscience de l’existence d’un système, ce qui nécessite d’avoir une vue d’ensemble tout en saisissant sa complexité. C’est pourquoi il nous a semblé important de pouvoir naviguer dans l’hyperpaysage en ayant le sentiment d’être dans un labyrinthe tout en disposant régulièrement d’outils pour se repérer, pour contextualiser l’information.

Références

Bernier G., 1998. Des cadavres exquis aux paradis virtuels, mémoire de maîtrise en littérature québécoise, Québec, Université Laval. membre.megaquebec.net/gulliver/cadavres.html

Clément, J., 1998. Du livre au texte, les implications intellectuelles de l’édition électronique, Sciences et techniques éducatives, 5, 4, pp. 401-409.

Clément J., 2000. Hypertexte et complexité, Études françaises, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, vol. 36, n°2. http://www.erudit.org/revue/etudfr/...

Choplin H., Galisson A. Lemarchand S., 1998. Hypermédias et pédagogie : comment promouvoir l’activité de l’élève ?, dans Hypermédias et apprentissage 4, Actes du 4ème colloque Hypermédias et apprentissages, Poitiers, INRP/EPI, éds J.-F. Rouet et B. de La Passardière, pp. 65-70.

Choplin H., Lemarchand S., Galisson A., 2001. Le problème de la conception collaborative des hypermédias pédagogiques, Actes du 5ème colloque Hypermédias et apprentissages, Paris, INRP/EPI, E. De Vries, J.-Ph. Pernin et J.-P. Peyrin (éds), pp. 251-258.

Choplin H. , Souchier E., 1999. Hypermédia et Didactique, la question des outils d’écriture, Actes des 21es journées internationales de l’éducation et de la communication scientifiques, Chamonix, A. Giordan, J.-L. Martinand et D. Raichvarg (éds).

Donguy J., s. d. Poésie et ordinateur, dans Littérature générée par ordinateur. www.refer.fr/multi_ct/littin...

Partoune C., 2004. Un modèle pédagogique global pour une approche du paysage fondée sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication, thèse de doctorat, Université de Liège, ch. II et VI.

Rinaudo J.-P., 1993. Lire-écrire des hyperdocuments au cycle III : quels intérêts ?, Revue de l’EPI.